Le gynécée d'Utho & Co

Ca y est. On va enfin pouvoir emménager. Si cela a mis si longtemps c’est qu’il a fallu faire quelques transformations pour contenter tout le monde. Le refuge devient exigu et nous n’avons pas osé défigurer les jardins avec de nouveaux bâtiments (comme certains l’ont fait avec leur caravansérail)…
Chez nous, maintenant, c’est dans les combles. Si Yoa ne peut se tenir debout que vers le centre et Heph se cogne parfois un peu aux poutres, la plupart d’entre nous disposent d’un espace suffisant.
Sauf qu’il y faisait une chaleur d’enfer le jour et un froid de canard la nuit…
Aussi, Mys s’est employée à isoler murs et plafond. Elle a tendu des pièces de cuir cousues ensemble sur les solives, en plusieurs couches croisées… et ce patchwork, bien que moyennement efficace, est du plus bel effet.
Mais c’est Heph qui a eu le plus de travail. Comme il n’y avait pas de lumière, elle a dû se décider à ouvrir une grande porte-fenêtre tournée vers l’est et construire un petit balcon en avancée pour que les animaux puissent s’ébattre un peu et prendre des bains de soleil… bien que la plupart d’entre eux préfèrent se tenir près de son autre réalisation : une cheminée. Eh oui ! On se pèle, la nuit, aux Tanaris… Mais que les clairs de lune y sont beaux !…
Puis Yoa a apporté de Mulgore des quantités de ces si jolis tapis tressés pour en couvrir le sol et égayer le peu de murs verticaux… ainsi que des rideaux de perles pour habiller les portes, une belle malle en bois et quelques paniers d’osier.
Minou a bien pensé à installer des lits… mais elle a vite oublié : cela n’aurait jamais tenu. Six petits matelas sont alignés par terre au creux des deux pentes, trois de chaque côté. On peut y dormir, bien sûr… On peut s’y asseoir aussi… nombreux… si on arrive à en déloger Minouchath, Néméesys et les chatons qui ont commencé à se les approprier et à les couvrir de poils… Mais Minou veille ! Elle fait le ménage régulièrement !
Enfin, une grande table basse tient le centre de la pièce. Une coupe de fruits, un pichet, quelques verres… des piles de bouquins (déjà !)… des bougies à profusion (qu’on n’allume que la nuit)… et un énorme bouquet de fleurs de feu fraîchement cueillies par Théa. Je lui ai aussi emprunté une fiole de cristal que j’ai posée bien au centre sur le linteau de la cheminée et dans laquelle je place ma rose rouge quand je ne la tiens pas à la main… pour l’empêcher de faner…
Et c’est tout. Pour le reste, on n’y trouvera que ce qu’on y apportera…
Au fait, c’est tout là haut… l’échelle de meunier… la porte bleue…
D’ailleurs, je vais y coller une étiquette :
C'est une maison bleue
Adossée à la colline
On y vient à pied
On ne frappe pas
Ceux qui vivent là ont jeté la clé…

http://www.paroles.net/chansons/21548.htm

Yoa est entrée dans la chambre, un paquet cadeau à la main et l’a déposé sur la table : « J’étais hier soir à Thunder Bluff. On m’a donné cela pour toi, Mys. »
Mys se lève d’un bond, se précipite vers le paquet, puis s’arrête… : « Qui ? »
Yoa hausse les épaules, se plie en deux pour se glisser dans la soupente et, fatiguée par le long voyage, à moitié endormie déjà, répond dans un souffle : « Devine ! »
Mys a pris le paquet, a commencé à défaire le ruban puis s’est ravisée. Elle s’est dirigée vers le balcon et a disparu dans l’angle mort de la porte.

Plongée dans ma lecture je n’ai pas vu le temps passer. Il fait déjà nuit.
Je me lève, allume quelques bougies *si seulement elles pouvaient rester allumées nuit et jour !…* Puis je m’approche du balcon et je jette un œil.
Minouchath fait méticuleusement sa toilette. Minichath joue avec une boulette de papier serrée par du ruban bleu. Néméesys dort à... griffes rétractées et, lovée contre son lion, Mys caresse quelque chose dans sa main. Ses doigts bougent doucement comme si elle égrenait un komboloï. Elle a l’air heureuse.
Elle me voit, me sourit et je ne peux m’empêcher de demander : « Le prince charmant ? »
Elle sourit à nouveau (aurait-elle déjà contracté le tic ?) : « Oui. »
« Mais… heu… Tu es vraiment sûre que… ? »
Troisième sourire, radieux celui-ci… : « Non, bien sûr… Mais ça n’a pas d’importance… Regarde Athéna ! »
Je cherche sa chouette des yeux et ne la vois pas…
« Là haut !… »

Là haut, dans le cercle parfait de la pleine lune, comme deux papillons saluant le printemps, deux silhouettes en ombre chinoise… deux chouettes de Darnassus. Elles dansent, virevoltent, se poursuivent, s’étreignent… puis plongent vers le grand arbre, déchirant l’air soyeux dans un bruissement d’ailes… et disparaissent ensemble dans une cavité du tronc…

Et la lune sourit…

La pièce est silencieuse et sombre.
Les fleurs de feu sont fanées.
Les bougies sont éteintes.
Les chouettes ont déserté le grand arbre.

Il reste une touffe de poils sur un tapis et un long cheveu roux flotte, accroché à la rambarde du balcon. Une feuille blanche, sur la table, brille dans un rayon de lune.

Citation :

Nous sommes reparties sur les routes. Nous dormirons dans les auberges là où notre travail nous appellera et nous nous consacrerons à améliorer nos connaissances artisanales qui sont, bien entendu, à votre disposition. Nous serons là aussi chaque fois que nos forces seront sollicitées et je chevaucherai volontiers mon tigre à la tête de toute manifestation pacifiste.
C’est tout.

Lu me y e re ve o u garde

Le gobelin du guet passe a proximité et crie :
« Dormez, braves gens ! Il est minuit et tout va bien. »


[HRP : Noob returns PvE]

*grogne*

Pas de doute, c'est bien des naines, même celle qui en ont pas l'air. Pas moyen de les faire changer d'avis.

*soupir triste*

utho....*soupir*

Lettre remmise à un gobelin, destinataire: Uthopya

Citation :

Bonjour Utho,
Peut on parler un peu?
Nos routes vont surement se croiser et pour moi tu es un des elements essentiels des messagers.
Peut etre certaines choses ont ete mal exprimees, peut etre y a til autre chose que je ne connais pas car je n'ai qu'une vue partielle de ce qui se passe au sein de notre clan.
Mais dans tous les cas, j'aimerai qu'on en parle si tu veux bien...
Que les vents te guident
Eldarkia

Alors qu'il gambade dans les couloirs du refuge avec quelques fleurs ramassées de-ci de-là et qui constitueront sans doutes une excellente salade, Velzen découvre l'échelle et la porte bleue. Persuadé qu'il s'agit tout simplement de sa chambre, il franchit les bareaux quatre à quatre et pénètre dans la pièce mystérieuse.

Il fait sombre. Un fin filet de lumière perse les volets fermés. Velzen, se cognant plusieurs fois dans les poutres trop basses malgré son dos courbé, traverse la pièce et ouvre avec toute la maladresse qui le caractérise les volets de bois mate.

Une large pièce s'offre à lui. Chaleureuse. Calme. Quelqu'un y vivait encore il y a peu, avant que le temps ne s'arrête sous les toits du refuge... Mais ceci, il ne le réalise pas. Ce qu'il voit, lui, ce sont ces bougies sur la table, et ces fleurs fatiguées. Pourquoi sortir des bougies si elles doivent rester éteintes ? Persuadé que ce sera du plus bel effet il s'empresse des les allumer. Elles brillent... Moins que la lumière du jour ? Peut être. Lorsqu'on les regarde de loin. Mais lorsqu'il s'approche, tellement près que leur chaleur se fait sentir et berce les sens, Velzen sait que le soleil n'est rien comparé à ces petites flammes qui dansent et virvoltent au rythme de ses mains qu'il agite.

Puis il retire les fleurs fanées et les pose délicatement sur le balcon, là, au dessus du jardin. Et dans le petit vase qui orne la table il dépose une à une chacune des fleurs qu'il transportait. Une pacifique, cueillie en Teldrassil. Une doulourante, cueillie dans les paluns -pourquoi porte-t-elle ce nom ?-. Une fleur de feu, cueillie en Tanaris. Une soleillette, cueillie dans les Hinterlands. Une feuillerêve, ceuillie à Sombrivage -ce n'est pourtant pas la région ?-. Et une aciérite sauvage, cueillie entre l'eau et les montagnes, à l'est des tarides. Ou était-ce en Ashenvale ? La feuillerêve semble couvrir les autres. Mais c'est bien la pacifique, toute de blanc vêtue et première venue, qui illumine le curieux bouquet. Six fleurs... pour un seul vase.

Velzen reste un instant à les contempler. Puis, lorsqu'il en ressent le besoin, il se lève et cherche un endroit où dormir. Ce sera sur les matelas qui couvrent le fond de la pièce. Sur trois à la fois puisqu'il y a de la place.

Et alors que les bougies dansent et que ses yeux se ferment, Velzen sourit. Et le temps reprend son cours...

Une petite forme blanche se glisse subrepticement dans la salle commune.
Le livre… où est-il ? Son sac à dos est trop petit pour les prendre tous mais celui-là il le lui faut ! Elle parcourt des yeux les étagères… en bas… au milieu… qui les a donc mis si haut ?… Pourquoi sont-ils donc si grands, ces taurens ?… ou pourquoi est-elle donc si petite ?
Une chaise… une autre chaise… un tabouret sur l’une des chaises… Elle s’agrippe pour seulement arriver à lire les titres, tournant la tête alternativement à droite et à gauche car, le moins qu’on puisse dire c’est qu’ils sont empilés au petit bonheur la chance… (Merci Eldy !).
Il n’est pas là. De toute façon elle n’aurait pas pu l’attraper sans escabeau… mais il n’est pas là. Là haut peut-être…
A pas de loup pour ne réveiller personne à cette heure si tardive, elle emprunte l’escalier, le long couloir, tâtonne pour trouver la première marche de l’échelle de meunier… la seconde… la troisième… se redresse. A hauteur de ses yeux, un rai de lumière filtre sous la porte. Y aurait-il quelqu’un ? Aurait-on déjà attribué leur chambre à quelqu’un d’autre ?… C’eût été normal, après tout… Mais son livre !
Tout doucement, elle pousse la porte, avance un pied… un œil… et s’accroche au chambranle pour ne pas tomber.
Elle a l’impression d’avoir déjà vécu ça… ou de l’avoir espéré dans son subconscient… sauf que ce n’est pas tout à fait ça… Il aurait dû y avoir… Ça aurait dû être… Il manque… Lequel ? Tous ?
Elle s’assoit par terre devant la table basse, ferme les yeux et, la tête en arrière, prend une grande inspiration. Calme… Puis, très lentement, elle expire, faisant à peine vaciller la bougie la plus proche. Calme…
*Tu es une prêtresse. Ta vie est consacrée aux choses de l’esprit. Ton rôle est d’étudier le bien et le mal, l’ombre et la lumière. Pas les émotions… Ne reste pas là hypnotisée par ces bougies. Cherche la vérité dans les livres anciens…. *
Le livre ! Il est là. Quelqu’un se sera cogné à la table et l’aura fait tomber à terre. Il est ouvert et la première phrase que l’on peut lire est :

Citation :

« N’aimer qu’un seul est barbarie, car c’est au détriment de tous les autres. Fût-ce l’amour de Dieu. »

*… *
Son livre en poche, alors qu’elle s’apprête à partir, se demandant si elle doit ou non éteindre les bougies, elle aperçoit une forme allongée dans la soupente. A nouveau ses genoux chancellent. Une vague de chaleur remonte dans ses veines… Serait-ce ?…
Non…
Qui est-ce d’ailleurs ? Elle ne se souvient pas l’avoir croisé mais il lui semble en avoir entendu parler. Un peu… simple… loufoque… écervelé… candide… extravagant en tout cas.
Et c’est lui qui… ?
Faut-il donc être candide pour appréhender la profondeur des êtres ? Faut-il dépouiller son esprit à l’extrême pour trouver les mots… les gestes… pour dire sans le dire ce que les autres ne disent pas en le disant ?
Comme il a l’air paisible… bien qu’un peu… bleu. Aurait-il froid ?
Elle ouvre la malle, prend un plaid en fourrure et le couvre tendrement. Elle aurait voulu lui exprimer tant de choses tangibles… de ces choses qui passent surtout par un regard, par le ton d’une voix… par un sourire…
C’est utopique.
Tous ces êtres de chair qui ne sont que des spectres que l’on traverse dès qu’on veut les saisir… c’est insoutenable.
Est-ce bien ? Est-ce mal ? C’est au dessus de ses forces en tout cas.
Dehors, il y a un monde hostile mais prévisible, des dialogues convenus, des missions possibles. Elle repense à une autre phrase de son livre :

Citation :

« Il n’y a pas de phénomènes moraux, rien qu’une interprétation morale des phénomènes. »

Petite prêtresse du clair-obscur, elle n’est pas prête à se confronter à l’immatérialité du réel.
Tout doucement, elle referme la porte et s’éloigne.
Oh, pas très loin… juste assez pour que les mots redeviennent paroles et s’envolent vite, sans laisser de trace, sans laisser d’angoisse…
Mais elle va potasser son livre. Un jour, peut être qu’elle arrivera à s’immerger dans cette tragi-comédie où les choses les plus graves n’ont aucune importance, où tout est faux et vrai à la fois, où la futilité prend des allures profondes. Un jour peut-être saura-t-elle discerner l’improbable « Par delà le bien et le mal ».

La porte se referme doucement sur la jeune prêtresse aux pas de velours. L’obscurité remplit de nouveau la pièce. Seul un halo de lumière blafarde émanant de la bougie éclaire faiblement un petit sac nimbé de poussière étincelante posé sur la table.

Sous cette aura féerique, une lettre est lentement recouverte d'un magma de cire.

« Douce Uthopya,

Je sais que tu aimais ce livre plus que tout autre, aussi je l’ai mis à ta portée, dans ce sanctuaire apaisant qui était votre chambre, en espérant que tu songerais à revenir le chercher.

Je n’ai pas voulu t’attendre afin de te le remettre, de peur de te faire subir encore d’autres tourments dont m’a parlé ta sœur Minoucheth.

Pourtant j’aurai pourtant voulu te dire tant de chose, te rassurer au creux de mes bras afin que tu retrouves cette innocente candeur qui faisait ta force et te protégeait.

Mais je manie les mots beaucoup moins bien que les masses, même si certaines phrases peuvent être beaucoup plus assassines que toutes armes d’Azeroth.

J’aurais tant voulu que tu saches… »

La grossière écriture qui recouvre le parchemin disparaît sous la cire qui s’écoule lentement de la bougie, la flamme égrenant le tristement temps depuis le départ des soeurs.

Seul la signature émerge encore de ce flot de cire

Retrouves la paix en toi

Galahad »